Ororon build, le guide complet

Histoire du personnage 1
En raison de l’existence des antiques noms, les Natlanois accordent une grande importance aux noms en général. Influencé par le milieu dans lequel il a grandi, Ororon a développé l’habitude de nommer tout ce qui l’entoure, organismes vivants ou non.
Certains noms les accompagnent toute leur vie. Quand vient le jour où une fleur fane ou une tasse se brise, elles ont porté leurs noms pour la durée de leur longue ou brève existence. Même pour une simple minute, leur utilité aura été remplie et leur valeur reconnue.
En revanche, d’autres noms changent avec le temps. Les sentiments d’Ororon restent les mêmes, mais le « propriétaire » du nom subit une sorte de transformation, alors il est naturel de lui donner un nouveau nom plus adapté. Par exemple, si un saurien prend de l’embonpoint, il ne pourrait plus être appelé Brindille, n’est-ce pas ?
Cependant, Ororon ne réfléchit pas trop longtemps au sens des noms. Tout d’abord, parce que ceux qu’il donne sont toujours très directs, au sens évident, mais également parce qu’il les attribue seulement pour faciliter la désignation, ni plus ni moins. En d’autres mots, ces noms n’ont aucune dimension émotionnelle. Pour Ororon, tous les noms sont précieux, neutres et égaux comme outils pour simplifier la communication.
Il en va de même pour son propre nom, la seule différence étant qu’il ne connait pas sa signification.
Le nom Ororon était inscrit sur le tissu qui l’enveloppait lorsqu’il fut trouvé. Malgré des recherches dans des livres anciens et auprès de certains aînés de la tribu, Ororon ne trouva aucune mention de son nom nulle part et il ne connait personne qui porte le même.
Était-ce simplement l’âge avancé de sa grand-mère ou le fait que l’écriture sur le tissu était peu claire, ou même une combinaison des deux qui auraient contribué à une lecture erronée ?
Enfin, il ne pourrait que chercher la réponse à cette question tout seul. S’il la posait directement, sa grand-mère lui mettrait une petite pichenette sur le front.

Histoire du personnage 2
Les membres de la tribu des Maîtres du vent nocturne ont l’habitude de consigner toutes sortes de contes, de légendes et d’événements historiques sur des rouleaux tissés. Les motifs tissés par des fils dans le tissu ne peuvent pas être aussi détaillés que les écrits. Ils tendent plutôt vers l’abstrait et des formes conceptuelles imprégnées des émotions et des sentiments du tisserand.
En d’autres mots, le processus de recréation dépend grandement de l’interprétation de chacun. Le sujet principal, l’arrière-plan, ce qui doit être mis en valeur, ce qui doit être simplifié… Tous ces éléments doivent être pris en considération par le tisserand et cela dépend également de sa créativité.
C’est simple en principe, mais cela rend Ororon perplexe.
Tout d’abord, il déteste devoir différencier les éléments primaires des éléments secondaires. Pour lui, tous les éléments sont d’une importance égale. Personnages, histoires, bâtiments ou paysages, tous méritent d’avoir la même quantité de fil dédiée. Même les gouttes de rosée sur une patte saurienne au sol sont dignes d’être représentées, tout comme les rides sur le visage des aînés qui ressortent vivement sur le tissu.
Cela pose un second problème : sa patience lorsqu’il tisse est assez limitée, en toute honnêteté. Par souci d’équité, le travail doit comporter le même nombre de couches et le même niveau de détail, qu’il s’agisse d’un grand arbre devant une porte ou l’ombre des personnes qui se trouvent en dessous. De ce fait, tout ce qu’il y a sur le tissu est simplifié jusqu’à un certain degré, au point que son œuvre peut à peine être appelée un rouleau tissé. Elle ressemble davantage à une serviette à motifs.
Certaines compétences sont tout simplement difficiles à enseigner, surtout dans le domaine artistique, où le talent joue énormément. Ayant fait preuve d’un talent extraordinaire dans d’autres domaines lorsqu’il était enfant, comme la perception des esprits et l’intuition en ce qui concernait le relevé des lignes énergétiques, les maîtres artisans de la tribu renoncèrent à ce qu’Ororon se perfectionne dans cet art. Au lieu de cela, ils lui permirent de considérer cette activité comme un simple loisir extrascolaire et le laissèrent l’exercer comme bon lui semblait.
Ororon en profita pour repousser les limites. Plus tard, il cessa complètement de se servir du tissu et du fil, leur préférant le papier et le crayon pour noter ses idées aussi rapidement et efficacement que possible. Après tout, s’il était possible de capturer l’essence de quelque chose en quelques traits, pourquoi passer par le processus lent et laborieux qu’est le tissage ? De plus, les Maîtres du vent nocturne étaient réputés pour leur talent de graffeurs. Ainsi, les membres d’autres tribus contemplaient les dessins d’Ororon avec admiration quand ils les voyaient, en pensant qu’il s’agissait de glyphes anciens imprégnés de mystérieuses bénédictions.
En réalité, Ororon n’avait jamais dessiné de choses particulièrement utiles. Son œuvre la plus significative et la plus soigneusement dessinée fut l’affiche accrochée devant la clinique d’Ifa. Les lignes étaient douces, les couleurs vives, et…
« Comme le pauvre saurien avait les ailes bandées, je me suis davantage concentré sur cette partie du dessin. Elle ne prend pas beaucoup de place, mais j’ai utilisé la même quantité d’encre que pour te dessiner. »
« D’accord », dit Ifa, qui se sentit apaisé en voyant la sincérité dans les yeux d’Ororon. « Je n’ai jamais vu une représentation aussi fidèle de moi-même. Merci, mon ami. »

Histoire du personnage 3
Ceux qui traitent les autres avec gentillesse recevront le même traitement en retour. Ce fut précisément son amour pour les nombreux êtres de la nature qui valut à Ororon la bienveillance des gens et des créatures de ces terres.
Ou pas… En réalité, les choses ne se passèrent pas exactement de la sorte. Évidemment, la plupart des gens étaient gentils avec Ororon, mais pas nécessairement en raison de son amour de la nature.
La première des raisons qui expliquaient leur comportement à son égard était la compassion : Ororon était un enfant abandonné qui avait été trouvé dans les montagnes, sans parents pour s’occuper de lui. Il aurait été impossible pour lui de survivre tout seul. Lui donner un coup de main en lui faisant don d’un peu de nourriture ou de vêtements était facile. De plus, la satisfaction de voir un enfant grandir en bonne santé valait de loin tous ces efforts. Alors pourquoi pas ?
L’autre raison était qu’ils l’aimaient bien. Ororon était très bien élevé (la plupart du temps), honnête (en général), calme, raisonnable, et il étudiait beaucoup. Il ne faisait jamais de bêtises, comme monter sur les toits et déchirer les tuiles. Il apprit même à cultiver des plantes et à élever des pucerons tout seul. Ce fut à partir de ce moment qu’il put subvenir à ses propres besoins. Ce n’était pas difficile d’apprécier un jeune homme qui ne causait pas (souvent) de problèmes aux gens qui l’entouraient.
Enfin, la dernière raison, bien que la moins répandue, était la culpabilité. Ororon naquit avec une âme fragmentée. Lorsqu’il fut trouvé par les membres de la tribu, ils tentèrent de se servir de cette particularité pour essayer une méthode de restauration des lignes énergétiques de Natlan. Cette approche qui demandait le sacrifice de quelqu’un n’aboutit pas, heureusement. Un dilemme éthique fut évité, mais certains aînés éprouvèrent toutefois un sentiment de culpabilité inavoué.
Évidemment, une fois adulte, Ororon apprit ce qui s’était passé. Il n’y avait pas d’intérêt à essayer de le lui cacher, car cela n’aurait fait que créer des problèmes inutiles. Pourtant, il n’éprouva aucun ressentiment envers la tribu à l’égard de cette affaire. Au contraire, il était content de l’apprendre. Même si la réalité était difficile, c’était mieux que de vivre dans le mensonge.
Il était parfaitement conscient des raisons pour lesquelles les gens se préoccupaient de lui. Qu’il s’agisse de compassion, d’affection, de culpabilité ou d’une combinaison des trois, il fut prêt à les accepter.
Comme le dirait Ifa, les relations sociales sont extrêmement complexes. Au lieu de consacrer du temps et des efforts à essayer de comprendre les motivations des autres, il fallait plutôt regarder leurs conclusions et leurs actions pour s’épargner un stress considérable. Comme les gens lui témoignaient de l’attention et de l’affection, il leur rendait la pareille. C’était aussi simple que cela.
« J’ai de la chance d’être un vétérinaire », dit Ifa en gesticulant. « Si j’étais un médecin qui soignait des gens, mon travail serait bien plus compliqué… »
Ifa continua en énumérant toutes sortes de cas médicaux étranges, mais Ororon ne l’écoutait plus. Ces cas eurent beau être étranges, mais aucun ne l’était plus que le sien.
« En y réfléchissant… Je suis aussi un patient en quelque sorte. Un patient qui n’a aucun espoir de guérison », pensa Ororon. Pour pousser la réflexion plus loin, si l’on se concentrait sur ses oreilles, dont l’apparence était différente de celles du commun des mortels, pouvait-il être considéré un animal malade ? Mais d’un autre côté, peut-être que les humains devraient être considérés comme des animaux ?
À ce stade de sa réflexion, Ororon interrompit l’interminable laïus d’Ifa et lui posa une question : « Si j’étais malade, devrais-je aller voir un vétérinaire ? »
Ifa s’arrêta au milieu de sa phrase et le fixa pendant un long moment.
« Tu n’as rien écouté de ce que je viens de dire, hein ? »
Ororon répondit : « Tu ne peux pas esquiver les questions auxquelles tu ne veux pas répondre en me les retournant, tu sais ? »

Histoire du personnage 4
Si vous aviez le temps et la patience d’examiner les textes anciens et les rouleaux tissés des Maîtres du vent nocturne, vous seriez surpris par l’étendue des sujets traités.
Par exemple, qui voudrait lire une série de romans légers d’Inazuma dont la publication s’est achevée il y a plusieurs siècles ?
Ou bien cette analyse de 3 600 formes différentes de cendres de papier brûlé et de leurs applications prophétiques ? Qui s’est donné la peine de compiler tout cela ?
Peu importe leur origine, la triste vérité était qu’Ororon devait les lire et les ranger.
Au début, il voulut simplement vérifier si les archives historiques avaient une quelconque mention d’âmes fragmentées, mais des mots comme « lignes énergétiques », « seigneur de la nuit » et « esprits » commencèrent à apparaître. Peu après, il se mit à lire des ouvrages de non-fiction, et même des romans fantastiques. En un rien de temps, les livres s’empilèrent comme une montagne de cacahuatl. Ororon devint un bibliothécaire bénévole, complètement submergé dans une mer de connaissances qui n’avaient absolument aucun rapport avec lui.
« Je ne suis pas aussi curieux… », se dit-il, commençant à se sentir un peu fatigué. Enfin, il n’avait rien d’autre à faire non plus. Et ce n’est pas comme si ces longues heures de lecture avaient été totalement inutiles.
L’explication la plus raisonnable qu’il avait lue jusqu’à présent se trouvait, à sa grande surprise, dans un livre d’histoire abîmé sur les créatures mystiques. D’après l’ouvrage, dans un passé lointain, pendant la Guerre des Archons, certains d’entre eux expérimentèrent sur la fusion génétique entre bêtes et humains. Leur but était de créer des guerriers aux pouvoirs supérieurs à ceux de simples mortels, dans l’espoir de prendre l’avantage. La plupart de ces tentatives échouèrent, mais quelques vestiges imparfaits survécurent jusqu’à nos jours.
« C’est assez plausible », pensa Ororon. « Mais ce n’est qu’un livre de contes… »
Pourtant, malgré tout, cela semblait plausible. »
D’un point de vue pratique, il savait qu’il ne découvrirait jamais la vérité grâce à son seul esprit d’une vingtaine d’années. Et ce, peu importe à quel point il y réfléchissait. Parfois, il fallait accepter ses propres limites et son ignorance, ou bien inventer une histoire pour s’amuser.
Au bout du compte, Ororon en arriva à un point où il ne pouvait plus lire un mot de plus. Il prit quelques minutes pour trouver une justification la plus simple possible, avant de se dire :
C’était comme un puzzle. En essayant d’assembler des pièces qui ne s’emboîtaient pas, il y avait forcément des déformations, des frottements, voire des cassures qui arrivaient. Un jour, il y a plus de vingt ans, Ororon fut cette pièce de puzzle cassée, qui eut le malheur de tomber sur la pierre froide et dure.

Histoire du personnage 5
Une fois, tard dans la nuit, quand le temps était doux, il s’assit près du feu de camp avec les Fatui et écouta leurs paroles en silence.
Ce fut le seul à rester discret, à l’exception de Capitano, qui les rejoignit plus tard. Les soldats ne firent pas de manières : ils étaient déjà informés de sa coopération avec leur commandant. Ils ne discutèrent pas de sujets particulièrement importants, mais ils parlèrent et rirent librement, ne montrant aucune retenue en sa présence. Après lui avoir demandé son âge, un soldat lui tendit même un verre d’une boisson incolore appelée « eau de feu ».
Il en prit une gorgée prudente, avant de boire tout d’une traite, comme les soldats l’avaient fait, ce qui lui valut des cris d’acclamation. Pour une certaine raison, il se sentait beaucoup mieux après cela.
Les soldats autour de lui bavardaient de tout et de rien, et entamaient parfois des chansons qu’ils connaissaient tous. Ororon n’avait pas grand-chose à ajouter, alors il resta simplement assis, les yeux rivés sur le feu ou sur le ciel. Il se sentait si loin du sol, chaque étoile ressemblait à un minuscule grain blanc, mais ensemble, elles formaient une sorte de brume. « Brume d’étoiles », se dit-il soudain. Pas mal comme nom…
Plus tard, il apprit que tous les soldats des Fatui ne ressemblaient pas à cela. Ceux qu’il avait rencontrés étaient des soldats d’élite dirigés par le 1er Exécuteur, des vétérans plus âgés, expérimentés et avec un code moral à toute épreuve. En dehors de cette compagnie, nombreux furent ceux qui étaient plus jeunes que lui ou ceux dont les actions lui feraient froncer les sourcils.
Cependant, dans cette nuit sans vent, pendant laquelle les étoiles étaient si visibles dans le ciel, il n’était pas encore troublé par de telles connaissances. Il mit simplement ses soucis de côté, profitant de la compagnie amicale et du verre de liqueur au goût étrange qu’on lui avait proposé.
Il n’y aurait plus jamais de nuit comme celle-ci. Il eut ce sentiment à ce moment-là, comme quand Capitano l’empêcha d’accepter un deuxième verre. Bien qu’il n’ait ressenti aucun effet néfaste après le premier verre et qu’il semblait pouvoir tenir l’alcool, il savait qu’il ne fallait pas dépasser les bornes.
Mais de toute évidence, Ororon n’était pas du genre à obéir. Plus tard, il retrouva discrètement le soldat qui lui tendit le verre et lui demanda comment faire pour brasser lui-même de l’eau de feu. S’il parvenait un jour à produire un lot suffisamment clair pour refléter le ciel nocturne, il appellerait la première bouteille « Brume d’étoiles ».